Procédure civile

Le 23 septembre 1999, Temtrade fait assignation contre L’Oréal (PBI) devant le Tribunal de commerce de Paris pour

  • annuler l’Avenant du 30 janvier 1998 pour dol
  • condamner L’Oréal (PBI) à lui payer la contre-valeur de 36.3 millions de dollars US
  • subsidiairement, condamner L’Oréal (PBI) à lui payer la même somme pour violation de son contrat d’exclusivité
  • demander au Tribunal de juger que la somme de 20 millions de francs français versée par la société PBI en exécution de l’Avenant du 30 janvier 1998 constituait une provision à valoir sur son indemnisation
  • ordonner, si nécessaire, une expertise afin d’estimer le manque à gagner de Temtrade.

Qu’est-ce qu’un dol ?

On dénomme dol, l’ensemble des agissements trompeurs ayant entraîné le consentement qu’une des parties à un contrat n’aurait pas donné, si elle n’avait pas été l’objet de ces manœuvres. Le dol suppose à la fois, de la part de l’auteur des manœuvres, une volonté de nuire et, pour la personne qui en a été l’objet, un résultat qui lui a été préjudiciable et qui justifie qu’elle obtienne l’annulation du contrat fondée sur le fait que son consentement a été vicié.
https://www.dictionnaire-juridique.com/definition/dol.php

22 novembre 2000 - Un parti pris troublant

Le Tribunal de commerce de Paris estime que « l’Avenant signé le 30 janvier 1998 était destiné à mettre fin au litige survenu entre les parties, tant pour le passé que pour l’avenir, et que le dol allégué par la société Temtrade, pas plus que le comportement déloyal imputé à la société PBI, n’étant établis, les demandes formulées par la société Temtrade étaient en conséquence atteintes par la péremption annale prévue par le Code des Obligations suisse. »

Il est troublant de remarquer que la seule occasion où la loi suisse a été appliquée dans la procédure l’a été lorsqu’elle était en faveur de L’Oréal.

Recours

Temtrade interjette appel auprès de la Cour d’appel de Paris pour annuler le jugement du Tribunal de Commerce de Paris du 23 novembre 2000.

  • à titre principal, que l’obtention de la signature de l’Avenant par Janez Mercun était constitutive d’une escroquerie, au sens du droit pénal suisse, la prescription de l’action civile en réparation de cette infraction étant de dix années,
  • à titre subsidiaire, déclarer nul pour dol l’Avenant du 30 janvier 1998 et de dire que la péremption de l’action n’est pas acquise, celle-ci n’ayant pas eu connaissance de son erreur avant le mois de décembre 1998.

L’Oréal, dans ces Conclusions récapitulatives, indique que la communication de pièces demandées par Temtrade touchait directement à ses intérêts légitimes et pourrait « porter atteinte au secret des affaires ». L’Oréal  a aussi demandé une décision tendant au rejet d’un certain nombre de pièces obtenues, selon elle, de manière frauduleuse par Temtrade.  

Dans un Arrêt du 23 octobre 2002, la Cour d’appel de Paris a

  • débouté PBI (L’Oréal) de sa demande tendant au rejet des pièces, « l’origine frauduleuse n’étant pas établie »
  • confirmé la décision de Tribunal de commerce en toutes ses dispositions « estimant que les pièces versées aux débats établissent au contraire la connaissance qu’avaient la société Temtrade et son dirigeant, dès l’année 1997, des structures et de l’ampleur du marché parallèle organisé par la société Parmobel dont ils connaissaient la qualité de filiale de la société PBI, ainsi que du fait que ce marché était approvisionné directement par cette dernière ».

Recours en révision

Temtrade a tenté d’obtenir l’annulation de la décision de la Cour d’appel de Paris du 23  novembre 2002 en interjetant pas moins de quatre appels. Tous ont été rejetés.

Recours en révision N° 1

Temtrade dépose un recours en révision le 27 juillet 2005 aux fins d’obtenir la révision de l’Arrêt de la Cour d’appel de Paris avec le recouvrement de pièces décisives visant à démontrer qu’en 1998 et 1999, soit postérieurement à la signature de l’Avenant, L’Oréal (PBI) a violé intentionnellement l’exclusivité accordée à Temtrade.

Ce recours était légalement fondé sur 19 pièces obtenues par Temtrade avec l’aide d’Alp Services le 3 juin 2005, comprenant notamment un rapport du Département d’audit de L’Oréal datant de septembre/octobre 1998.

Recours en révision N° 2

Par acte du 24 mai 2006, Temtrade a introduit un second recours en révision fondé sur le témoignage de M. Olivier Carrobourg en invoquant les dispositions de l’art. 595 al. 1 et al. 2 du Code de procédure civile.

Par ordonnance de mise en état du 21 juin 2006, les deux recours ont été joints.

Par décision en date du 17 octobre 2007, la Cour d’appel de Paris a rejeté les deux recours comme étant tardifs et en conséquence irrecevables au regard de l’art. 596 du Code de procédure civile.

Recours en révision N° 3

Ce recours, fondé sur de nouveaux documents prouvant les accusations de Temtrade, a été déposé le 11 avril 2011.

Par Arrêt N° 194 du 18 juin 2014, la Cour d’appel de Paris déclare irrecevable  la demande de révision de Temtrade pour fraude et formée par voie de conclusions pour recouvrement de pièces décisives retenues par le fait de l’autre partie.

Recours en révision N° 4

Ce recours, fondé sur des documents nouvellement découverts prouvant les accusations de Temtrade, a été déposé le 12 octobre 2012.

Par Arrêt N° 196 du 18 juin 2014, la Cour d’appel de Paris déclare irrecevable le recours en révision pour recouvrement de pièces décisives retenues par le fait de l’autre partie.

Pourvoi en Cour de cassation

Temtrade s’est ensuite pourvue en cassation.

Par un Arrêt de la Cour de cassation du 14 juin 2015, l’Arrêt de la Cour d’appel de Paris du 23 novembre 2002 est devenu définitif.

Transaction éventuelle entre Temtrade et L’Oréal

Des négociations sur une transaction éventuelle entre les deux parties ont été envisagées en décembre 2004 et janvier 2005.

Dans ces discussions, L’Oréal a demandé à Me Maurice Lantourne, conseil de Janez Mercun, de chiffrer précisément le préjudice de Temtrade en raison de l’inexécution par L’Oréal de l’Avenant signé le 30 janvier 1998.

Temtrade a évalué ce préjudice à 117 millions USD suite aux livraisons de L’Oréal sur le marché noir russe entre 1994 et 1999. L’Oréal a alors indiqué que seule la réparation des conséquences de la violation de l’exclusivité pendant les années 1998 et 1999 pouvait être envisagée : elle a été évaluée à 41.416 millions USD le 8 janvier 2009.

Ces discussions sont restées sans suite pour des raisons couvertes par le secret professionnel entre avocats.