Olivier Carrobourg

Ancien directeur financier au sein du Groupe L’Oréal. Expatrié en 1999 comme directeur financier à Dubaï de la filiale Parmobel jusqu’à fin 2001.

PV no 06/0053/18 D139-146 25 Janvier 2007

Points principaux

Pouvez-vous nous expliquer l’origine de la mise en place de ce marché gris en Russie par L’Oréal ?

La mise en place de ce système a commencé en 1996 à la demande de la direction générale, Gilles Weil, M. Cabane, M. Guyot-Jeannin, M. Frolet. Nous étions dans le dernier trimestre 1996, la division de produits de luxe dirigée par M. Weil avait du mal à réaliser le chiffre d’affaires de l’année. M. Frolet avait réuni l’ensemble des cadres travaillant chez PBI et le mot d’ordre était simple : « faire feu de tout bois ». M.Guisset, directeur de la zone « Centre Orient », a expliqué qu’il y aurait des possibilités de faire du chiffre sur la Russie mais « dans le dos » de la societé Temtrade.

Nous vous présentons six feuilles dactylographiées portant la mention initiale « Cette cassette est enregistrée par Olivier Carrobourg » (scellé Carrobourg UN cotes 20 à 25), documents découverts par nous à votre domicile. Ces documents sont-ils bien la retranscription d’une cassette audio que vous aviez enregistrée ?

Oui.

Ces six feuilles dactylographiées exposent une partie de votre activité au sein de L’Oréal comme directeur administratif et financier de M. Serge Guisset, directeur de la Zone Centre-Orient chez Parfums & Beauté International – PBI. Est-ce exact ?

Oui.

Vous détaillez dans ces pages l’existence d’un marché gris en Russie pour la vente de certains produits L’Oréal, système mis en place par des dirigeants de L’Oréal, est-ce exact ?

Oui.

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Scellé Carrobourg UN cotes 20 à 25

Témoignage - Olivier Carrobourg

Retranscription d’une cassette audio

Cette cassette est enregistrée par Olivier Carrobourg.

Elle vise à retracer un certain nombre d’éléments concernant des opérations faites sur la Russie par PBI, filiale du Groupe L’Oréal.

Les faits remontent à 1994. A cette époque, j’étais le directeur administratif et financier de M. Serge Guisset, directeur de la Zone Centre-Orient chez PBI. Avec lui, j’allais  Dubaï à peu près deux fois par an et nous rendions visite à notre filiale Parmobel, située à Dubaï. Parmobel était à l’époque une joint venture entre L’Oréal qui détenait 75% et la famille Chahloub qui en détenait 25%.

Nous avions comme interlocuteurs M. Jean-Claude Bonnefoi, le directeur général de l’affaire.

Il nous a expliqué à plusieurs reprises que certains de ses agents vendaient de plus en plus à des acheteurs russes. Il nous disait qu’au départ, ces acheteurs russes étaient des touristes qui remplissaient des valises et que, petit à petit, ces acheteurs se sont organisés. Ils se sont organisés en véritables réseaux. Ils s’approvisionnaient directement auprès de certains de nos agents, notamment à Dubaï, à Koweït et à Beyrouth.

En 1995, j’ai appris de Serge Guisset, que pour faire face à une demande de plus en plus forte, il avait accepté avec Jean-Claude Bonnefoi, la proposition de Patrick Chalhoub, qui consistait à mettre deux circuits en place, l’un via le Liban avec notre agent pour le marché local, qui était la société Socodile, l’autre via la Syrie, avec la famille Massoud.

Ainsi, Jean-Claude Bonnefoi, de 1995 à 1996, nous présentait les comptes de Parmobel avec du chiffre d’affaires russe, sous deux rubriques.

  • La première, c’était le chiffre d’affaires russe qui passait à travers ses agents marchés locaux. C’était un chiffre d’affaires que l’on ne contrôlait pas puisqu’il était fait à travers la distribution de nos agents.
  • Et le chiffre d’affaires qu’il faisait sur les deux circuits, c’est-à-dire Socodile et Massoud, que Parmobel contrôlait en termes de prix et de quantités.

Serge Guisset donnait son aval sur l’ensemble de ces affaires et Jean-Claude Bonnefoi, dans tous ses rapports, notamment ses rapports annuels, faisait état des chiffres d’affaires russes. C’est des rapports qui étaient adressés à la fois à la direction de PBI et à nos partenaires, c’est-à-dire la famille Chalhoub.

Le dernier trimestre de l’année 1996, Jean-Yves Frolet, le patron de PBI, a convoqué ses principaux collaborateurs, environ 7-8 personnes, pour faire part de ses inquiétudes sur le bouclage de l’année. Il manquait en effet du chiffre d’affaires. Parmi les solutions qu’il avait envisagées, il nous a dit qu’il fallait augmenter le chiffre d’affaires avec les Russes et que ce chiffre d’affaires serait logé dans les Duty Free. Il avait vu cela avec M. Cabane, le directeur financier de Gilles Weil, vice-président de L’Oréal en charge de la Division des produits de luxe. M. Cabane était d’accord.

A cette même époque, Jean-Yves Frolet a organisé une série de réunions beaucoup plus restreintes. J’y ai notamment été convié avec Serge Guisset et Hugues de Beaugrenier.

Hugues de Beaugrenier était le directeur financier et administratif des duty free. Dans l’une de ces réunions, j’ai appris de Serge Guisset et Jean-Yves Frolet que le chiffre d’affaires russe se ferait via notre agent des duty free grecs, M. Georgantas. Je n’ai pas eu de contact avec ce monsieur, par contre, je l’ai vu arriver dans le bureau de M. Guisset. J’ai ensuite reçu des notes de suivi sur cette affaire de la part de M. de Beaugrenier, qui étaient adressées à M. Pierre Cabane. Au résultat des courses, le chiffre d’affaires qu’avait demandé M. Jean-Yves Frolet a bien été réalisé avec cet agent Georgantas. Et pourtant, M. Guisset m’a fait part qu’il considérait que ce n’était pas un bon circuit pour faire du chiffre d’affaires sur la Russie, sans d’ailleurs me donner les raisons qui le motivaient.

A cette époque, c’est-à-dire à fin 1996, Serge Guisset m’a dit que M. Patrick Chalhoub l’avait introduit auprès d’un nouveau distributeur russe qui s’appelait Vladimir Nekrasov, via l’intermédiaire de Claudine Kawiak. M. Guisset m’avait précisé que Claudine Kawiak était une professionnelle du métier puisqu’elle avait été l’ancienne directrice de la marque Helena Rubinstein. Il m’a précisé que ce nouveau circuit, qui allait faire intervenir Patrick Chalhoub, Claudine Kawiak et Vladimir Nekrasov, allait donc remplacer le circuit Georgantas afin d’alimenter le marché russe. Afin de laisser des marges en Suisse, M. Guisset m’a aussi précisé qu’un certain M. Rechberger allait intervenir. Martin Rechberger est en fait un client de l’entité Duty Free Europe. Ce circuit devait se mettre en place dès 1997. Et j’ai participé à des réunions dans le bureau de M. Serge Guisset avec Robert Dufrêne, directeur des Opérations de PBI, afin de mettre cette opération sur pied.

Concrètement, M. Guisset m’a remis des listes de produits, et je devais vérifier avec Robert Dufrêne les quantités disponibles. Je devais ensuite les communiquer par téléphone à M. Rechberger. Le numéro de téléphone m’avait été donné par Serge Guisset. Il s’agissait d’un numéro en Suisse.

Serge Guisset m’a demandé de facturer Parmobel. Et ensuite Parmobel devait facturer Fitra, une société basée à Dubaï et appartenant aux Chalhoub. A Paris, la commande était traitée comme une commande de Parmobel. Et c’est le service Trafic de Robert Dufrêne qui modifiait les instructions de livraison pour que cela ne soit pas livré directement à Dubaï comme les autres commandes de Parmobel. Ce schéma a duré tout le long du premier trimestre 1997, et parallèlement, Serge Guisset avait demandé à Robert Dufrêne de constituer un stock à Dubaï pour traiter l’ensemble de ces opérations russes qui seraient ensuite logées à Parmobel. Ce stock a donc été opérationnel à Dubaï à partir du deuxième trimestre 1997. Durant cette période, Olivier Loustalan, qui était en charge du marché russe, a été totalement écarté des affaires, aussi bien pour l’affaire Georgantas, fin 1996, que pour ces premières affaires qui ont été réalisées à Paris pour le compte Dubaï en début 1997. Serge Guisset m’avait effectivement expliqué qu’il était en discussion avec la direction de PBI pour négocier son départ. Jean-Yves Frolet considérait que M. Loustalan avait été un collaborateur précieux pendant la période des barter, mais que par rapport à la nouvelle situation qui se créait en Russie, il n’était plus du tout adapté. Et Olivier Loustalan quittera effectivement la société dans le courant de l’année 1997.

Dès la création de ce nouveau circuit sur la Russie via Dubaï, Serge Guisset s’était mis d’accord avec Patrick Chalhoub pour que PBI puisse récupérer 100% de l’ensemble des affaires russes traitées à Dubaï, c’est-à-dire les trois circuits : Socodile, Massoud et le nouveau circuit Fitra, de façon à pouvoir utiliser cet argent sur les investissements publicitaires que nous réalisions en Russie et sur d’autres pays de l’Europe de l’Est.

Au début des opérations, je me souviens avoir fait deux notes importantes :

  • L’une à la demande de Serge Guisset pour informer Jean-Claude Bonnefoi de la marche à suivre. C’était une note que j’avais adressée de manière confidentielle au domicile de Jean-Claude Bonnefoi.
  • L’autre note était à mon initiative et je l’avais adressée à Serge Guisset. Cela concernait l’incidence qu’allait avoir l’apport du chiffre d’affaires russe que l’on mettant dans Parmobel, sur la formule de rachat de la joint-venture Parmobel à la famille Chalhoub.

En effet, 1997 était une année clé puisque L’Oréal devait racheter une partie des actions aux Chalhoub. Serge Guisset m’a répondu oralement qu’il avait vu à ce sujet M. Gilles Weil et que tout le chiffre d’affaires, y compris le chiffre d’affaires réalisé sur les Russes, serait pris en compte dans la formule de rachat.

Effectivement, M. Wirth de la direction générale de l’administration et des finances du Groupe L’Oréal m’a demandé des précisions sur l’augmentation du chiffre d’affaires de Parmobel. Je lui avais expliqué la composition du chiffre d’affaires, y compris le chiffre d’affaires russe.

In fine, le rachat des parts a été fait en tenant compte du chiffre d’affaires russe. Beaucoup plus tard, en 2000, j’ai été amené à discuter avec M. Welbes en charge de la sécurité des marchés pour la Division des produits de luxe, sur l’incidence qu’avait eu le chiffre d’affaires russe sur le prix de rachat des parts à la famille Chalhoub. Lors de cette discussion qui avait donc lieu en l’an 2000, à Dubaï où j’étais en place depuis 1999, Paul Welbes m’a demandé une copie de cette note pour la montrer à M. Gérard Guyot-Jeannin, le bras droit de Gilles Weil. Il voulait en effet s’assurer si, à l’époque, c’est-à-dire en 1997, Gérard Guyot-Jeannin avait été mis au courant de cette incidence. Je lui ai donc remis une copie de cette note.

Pendant l’année 1997, je me suis rendu plusieurs fois à Dubaï. A chaque fois, j’ai entendu Jean-Claude Bonnefoi se plaindre sur ce nouveau circuit avec Fitra. Il le jugeait moins rentable et moins sûr que les circuits de Socodile et Massoud. Jean-Claude Bonnefoi m’avait aussi confié qu’il n’aimait pas non plus la gestion de ce stock spécifique russe fait à la demande de PBI. J’ai d’ailleurs fait l’un de ces voyages pour accompagner M. Cabane. Ce voyage a eu lieu fin 1997. Je lui ai fait visiter l’entrepôt avec la responsable de la logistique de Dubaï, Margaret Abu Ras. Elle nous a montré les stocks destinés au nouveau circuit. Ils étaient localisés chez Fitra, une société appartenant au Groupe Chalhoub, et occupaient 4 à 5 rangées de pelletiers d’une longueur d’environ 50 mètres chacune.

Par ailleurs, en 1997, Serge Guisset m’a tenu au courant que M. Mercun, notre agent sur la Russie, Biélorussie et l’Ukraine, se plaignait des produits qu’il retrouvait sur son marché via des circuits de diversion. Serge Guisset m’a informé que le différend commercial avec M. Mercun avait été réglé par un chèque de 20 million de francs en janvier 1998. Mais je n’ai pas reçu d’ordre de faire arrêter les circuits mis en place au départ de Dubaï pour faire du chiffre d’affaires sur la Russie.

A la fin du premier trimestre 1998, j’ai été informé par M. Welbes qu’un lot de marchandises venait d’être intercepté par les Douanes belges. Dans le cadre de cette saisie, le service de la sécurité des marchés qui avait eu accès à la marchandise, avait lu les codes-barres et avait identifié que les produits provenaient de Fitra.doc, qui était le nom de code du circuit de ces réexpéditions sur la Russie. M. Welbes m’a alors convoqué à une réunion qui s’est tenue rue d’Alsace à Clichy, en présence des acheteurs. Il s’agissait de la société Global Cosmetics qui était ce jour-là représentée par deux personnes, dont j’ai encore la carte de visite : Alain Korcaz et Mike Wolberger. A cette réunion étaient également présents M. José Monterro, des services juridiques, Me Martens, avocat du Groupe L’Oréal en Belgique, et M. Welbes. Durant cette réunion, M. Korcaz, pour se justifier, a expliqué que dans cette affaire de diversion, il y avait de hauts dirigeants du groupe qui étaient impliqués. A la fin de la réunion M. Wolberger m’a proposé un déjeuner avec M. Korcaz. J’ai refusé cette invitation et j’ai informé Serge Guisset. Beaucoup plus tard, j’ai appris de M. Welbes, lors de l’un de ses déplacements à Dubaï en l’an 2000, que finalement il avait revu Korcaz après la saisie de 1998, et il m’a dit qu’il en avait appris de belles. C’est l’expression même qu’il avait employée.

A l’issue de cette saisie en douane en 1998, Serge Guisset m’avait confié qu’il en avait marre de ces conneries, c’était exactement ses termes et qu’il voulait à tout prix arrêter les circuits russes car il n’était pas payé pour cela. Il m’avait d’ailleurs demandé de préparer un état des stocks de chez Parmobel que l’on appelait en interne les stocks de « Parmobel  2 ». Je l’ai fait. Et je l’ai aussi présenté à M. Cabane vers mi-1998.

Après l’été, en septembre 1998, j’ai été convié à une réunion à laquelle assistait M. Cabane, M. Guyot-Jeannin et M. Weil. Je me souviens que M. Cabane a beaucoup insisté sur l’incidence négative qu’aurait un retour des stocks de « Parmobel 2 ». Finalement, en fin de réunion, M. Weil a donné son consentement pour écouler les stocks russes à Dubaï et nous a dit de faire au mieux.

A l’issue de cette réunion M. Guisset m’a demandé de faire des prix planchers et de les montrer à Pierre Cabane. Je suis allé voir M. Cabane dans son bureau avec la liste des prix planchers et il m’a donné son OK. Je me suis alors rendu avec M. Guisset chez M. Patrick Chalhoub dans son appartement parisien, dans le 8e arrondissement. Nous lui avons alors remis ces fameux prix planchers et devant nous, il a eu une conversation téléphonique sur ce sujet avec Maryse Awwad, son employée dans la société Fitra. C’est donc sur la base de ces prix planchers qu’ont été effectuées les ventes en fin 1998.

J’ai pu constater de visu que Patrick Chalhoub utilisait alors toujours le même circuit. En effet, lors d’un de mes voyages au dernier trimestre 1998, j’ai participé à une réunion dans la salle de réunion des bureaux de Chalhoub à Dubaï. L’objet de cette réunion était des discussions budgétaires. M. Patrick Chalhoub a alors été appelé par sa secrétaire et s’est absenté un moment. M. Patrick Chalhoub a ensuite appelé Serge Guisset pour lui demander de venir le rejoindre. Et un moment plus tard Serge Guisset m’a fait entrer dans le bureau de Patrick Chalhoub et m’a présenté à Vladimir Nekrasov, de la Société Alvan. La réunion était terminée et nous nous sommes dit uniquement bonjour et au revoir. Je voyais M. Nekrasov pour la première fois. J’avais plusieurs fois entendu ce nom dans la bouche de M. Guisset. Et je me souviens que Patrick Chalhoub avait dit de M. Nekrasov que c’était un homme dangereux à tous points de vue.

A la même époque, fin 1998, les services d’audit interne de L’Oréal remettaient leur rapport sur une mission à Dubaï concernant les marchés parasitaires. Ce rapport faisait clairement apparaître le poids des affaires russes dans la répartition du chiffre d’affaires de Parmobel. Ce circuit de distribution était appelé « Autres – ex-Républiques soviétiques ». Pour 1997, il s’était élevé à 20 millions de dollars, soit plus d’un tiers du chiffre d’affaires de Parmobel. Dans ce rapport, les auditeurs écrivaient ce que tout le monde savait, Parmobel approvisionne les républiques de l’ex-Union soviétique depuis 1997 par l’intermédiaire de Fitra et de trois autres clients. Les chiffres de 1998 y figuraient : chiffre d’affaires réalisé, budget, tendance, le niveau des stocks, et des éléments sur la tarification. J’étais dans la liste des destinataires de ce rapport qui était transmis à deux vice-présidents du Groupe L’Oréal, MM. Weil et Castres-Saint-Martin.

Fin décembre 1998, j’ai été informé par Serge Guisset que M. Owen-Jones venait en visite à Dubaï début 1999 pour visiter les deux filiales, celle des produits publics qui venait de s’y implanter et Parmobel.

M. Guisset m’a fait participer à toutes les réunions préparatoires sur place à Dubaï. Comme M. Bonnefoi était sur le point de partir en préretraite en février 1999, il a demandé à son successeur Fahdi Jabbour de présenter les activités de Parmobel à l’exception des affaires russes. Serge Guisset a voulu que ce soit moi qui présente à M. Owen-Jones l’activité russe faite au départ de Parmobel.

Plusieurs exemplaires du dossier de voyage ont été remis par Claire Garaud au secrétariat de M. Gilles Weil pour M. Owen-Jones et les personnes qui l’accompagnaient. Dans ce dossier, il y avait une page intitulée « Activité sur les ex-Républiques soviétiques musulmanes ». Il s’agissait de l’activité russe à partir de Dubaï. Pourtant, après ma présentation, M. Owen-Jones a agi comme quelqu’un qui découvrait la situation et il a demandé à deux reprises :« Qui a organisé cela ? ». Serge Guisset a alors dit : « C’est moi ». M. Owen-Jones a demandé à Gilles Weil s’il était au courant. Il a répondu sans parler par un léger hochement de la tête. M. Owen-Jones a demandé d’arrêter immédiatement ces affaires.

Lors de mon arrivée à Dubaï fin février 1999, où j’ai pris mes fonctions, Serge Guisset m’a téléphoné pour m’informer qu’il avait eu le feu vert de la Division pour liquider un maximum de stock avec comme date butoir le 30 juin 1999.

J’ai d’ailleurs reçu dans mon courrier une note de Fadi Jabbour envoyé à PBI à l’attention de Serge Guisset sur ce sujet. Il faisait référence au circuit des Massoud et Fitra.doc. Il disait avoir fait un point précis avec Patrick Chalhoub et Ariane Thomas en accord avec les instructions de Serge Guisset. Il citait combien ces clients étaient budgétés pour l‘année 1999, ce qui avait été réalisé et ce qui allait être facturé jusqu’au 30 juin 1999. Il a alors évalué le stock qui resterait chez Parmobel au 30 juin 1999.

En juillet 1999, j’ai adressé un fax à MM. Guisset, Zanella, Jabbour et Chalhoub en donnant le montant exact des stocks et en demandant les instructions concernant le retour de ces stocks à Paris. Ces stocks représentaient 1 million de dollars. Fin 1999, l’ensemble de ces stocks a été réceptionné en retour à Paris.

Fin 1999, Me Degueldre a effectué un voyage à Dubaï avec M. Simoncelli, responsable du service juridique du Groupe. Le but de ce voyage était de savoir comment les opérations avaient été réalisées à Dubaï. Je leur ai fait visiter l’entrepôt, comme je l’avais fait deux ans auparavant avec M. Cabane. Ils ont rencontré M. Chalhoub. J’ai assisté à une réunion de travail avec Maryse Awwad, une employée de Fitra. Elle a été très précise et elle a décrit les circuits qu’il y avait eu au fil du temps au départ de Fitra.

Pour la première fois, j’ai pu mettre ensemble les éléments du puzzle entre M. Martin Rechberger, Scapa, Callaway, Camasa, Alvan, Nekrasov. Maryse Awwad faisait référence à M. Rechberger par son prénom « Monsieur Martin ». Maryse Awwad nous a expliqué qu’en 1997, M. Rechberger utilisait la société Scapa, localisée aux British Virgin Islands, pour approvisionner deux circuits, Alvan et Camasa. La marchandise passait en transit temporaire par la Hollande.

En 1998, M. Rechberger utilisait alors la société Callaway, située aux British Virgin Islands, pour alimenter le circuit Camasa. Quant au circuit Alvan, il se faisait directement au départ de Dubaï ou de Sharjah. Après la prise des produits sous douane en Belgique, uniquement le circuit Alvan a été poursuivi en ligne directe de Dubaï. Pour 1999, il en a été de même, uniquement le circuit Alvan au départ de Dubaï.

Maryse Awwad nous a précisé aussi que pour régler les problèmes liés au paiement, elle devait se rendre dans des hôtels à Dubaï ou à Sharjah. Elle nous a dit que les paiements étaient très compliqués, sans nous préciser pourquoi ils étaient très compliqués, ni pourquoi elle ne rencontrait pas ses interlocuteurs dans les bureaux de Patrick Chalhoub.

A l’origine M. Serge Guisset m’avait donc expliqué que M. Rechberger intervenait pour que les clients russes aient des marges en Suisse. Maryse Awwad ne nous a pas du tout expliqué pourquoi ceux des sociétés aux Îles Vierges Britanniques sont intervenus dans ces circuits.

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V no 06/00053/65 D00322-323 11 Janvier 2008

Scellé Carrobourg DEUX cotes 1 à 13

Contenant des documents extraits du dossier « Corbeille » de l’ordinateur Fujitsu Siemens de M. Olivier Carrobourg.

Officier Christophe Marais, Lieutenant, Officier de Police Judiciaire en résidence au Ministère de l’Intérieur, 11 rue des Saussaies, 75008 Paris

Disons procéder à l’étude et à l’analyse de documents placés sous scellé CARROBOURG DEUX (cotes 1 à 13)… Relevons comme suit les informations paraissant utiles à la présente enquête :

Cote 2

(Sans date, entrée placée entre deux notes, l’une du 04.02.1998 et la seconde du 29.01.1999) « P&B245 a mandaté Maître Degueldre pour discuter avec les dirigeants du groupe Hermitage qui s’approvisionne à Dubaï chez Fitra… via un certain Martin. Les dirigeants d’Hermitage créent Star Beauté pour exécuter le 1er contrat avec la marque Biotherm ».

Cote 8

Projet de note de M. Carrobourg à MM. Weil et Lauzat (sans référence de date):

« En effet, la décision de mener, officieusement, à côté du contrat avec M. Mercun, des affaires sur le Marché russe relève d’une décision de la Direction de la Division. En tant que Daf246 de Zone avant M. Zanella, j’ai moi-même été témoin d’une réunion de M. Guisset (alors le patron de la Zone) avec M. Guyot-Jeannin ainsi qu’à des échanges avec M. Cabane. D’ailleurs, ce dernier en personne fixait le niveau de prix (tandis que la direction de la Division validait les volumes), ces informations transmises à M. Guisset, puis à moi-même étaient ensuite adressées à Parmobel qui servait de base avancée de logistique (et qui utilisait comme vous le savez des sociétés-écrans du groupe Chalhoub qui ne faisait que suivre les instructions venant de la direction de Parmobel tant pour les prix que les volumes notamment en fonction des besoins financiers de la Division) ».

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245 Parfum & Beauté.

246 Directeur administratif et financier.